LES MANDATS PRIS PAR CORRESPONDANCE

1° LES DISPOSITIONS LEGALES APPLICABLES AU MANDAT PRIS A DOMICILE

Un mandat pris à domicile doit respecter les dispositions de l’article L 121-23 du Code de la consommation.

Selon cet article :

« Les opérations visées à l’article L. 121-21 doivent faire l’objet d’un contrat dont un exemplaire doit être remis au client au moment de la conclusion de ce contrat et comporter, à peine de nullité, les mentions suivantes :

1° Noms du fournisseur et du démarcheur ;

2° Adresse du fournisseur ;

3° Adresse du lieu de conclusion du contrat ;

4° Désignation précise de la nature et des caractéristiques des biens offerts ou des services proposés ;

5° Conditions d’exécution du contrat, notamment les modalités et le délai de livraison des biens, ou d’exécution de la prestation de services ;

6° Prix global à payer et modalités de paiement ; en cas de vente à tempérament ou de vente à crédit, les formes exigées par la réglementation sur la vente à crédit, ainsi que le taux nominal de l’intérêt et le taux effectif global de l’intérêt déterminé dans les conditions prévues à l’article L. 313-1 ;

7° Faculté de renonciation prévue à l’article L. 121-25, ainsi que les conditions d’exercice de cette faculté et, de façon apparente, le texte intégral des articles L. 121-23, L. 121-24, L. 121-25 et L. 121-26. »

L’article L. 121-24 du Code de la consommation dispose que :

« Le contrat visé à l’article L. 121-23 du code de la consommation doit comprendre un formulaire détachable destiné à faciliter l’exercice de la faculté de renonciation dans les conditions prévues à l’article L. 121-25. Un décret en Conseil d’Etat précisera les mentions devant figurer sur ce formulaire.

Ce contrat ne peut comporter aucune clause attributive de compétence.

Tous les exemplaires du contrat doivent être signés et datés de la main même du client. »

Concernant la faculté de rétractation, il doit être annexé au mandat un coupon détachable comportant d’un côté la formule de rétractation et de l’autre le nom et l’adresse du professionnel qui sera destinataire de cet avis de rétractation.

2° LA REGLEMENTATION ANTERIEURE APPLICABLE AUX MANDATS PRIS PAR CORRESPONDANCE

Dans un précédent article publié dans ADMINISTRER en 2003 sous le n°…..et intitulé « La prise de mandat par correspondance », il avait été développé que la méthode la plus sûre afin d’éviter toute contestation, consistait à adresser au client un mandat complet comportant la date d’émission, le numéro du registre des mandats, et la signature de l’agent immobilier

Il n’était pas nécessaire d’adresser un formulaire de rétractation puisqu’il s’agissait d’un mandat pris par correspondance qui n’était pas assimilable à un mandat pris à domicile.

Pourtant, la jurisprudence en a décidé autrement.

La méthode précédemment développée n’est donc plus d’actualité.

3° L’ARRET RENDU PAR LA COUR D’APPEL DE MONTPELLIER EN DATE DU 25 MARS 2008

Par un arrêt en date du 25 mars 2008, la Cour d’appel de MONTPELLIER (1ère Chambre Section A01 N°RG 07/2129) a étendu l’application de l’article L. 121-23 du Code de la consommation aux mandats pris par correspondance.

Dans cette affaire, une agence immobilière avait envoyé un mandat de vente par voie postale sans joindre un coupon de rétractation permettant au mandant de revenir sur son engagement dans les 7 jours de sa signature.

La Cour d’appel a confirmé le jugement rendu le 7 mars 2007 par le Tribunal de Grande Instance de MONTPELLIER qui a constaté la nullité du mandat aux motifs que l’agence immobilière n’avait pas respecté les dispositions de l’article L. 121-23 du Code de la consommation en omettant de joindre au mandat un coupon de rétractation.

Cette jurisprudence est surprenante puisqu’elle considère que tout mandat pris en dehors de l’agence immobilière est assimilable à un mandat pris à domicile et, doit donc respecter les dispositions du Code de la consommation.

4° L’ENVOI AU CLIENT D’EXEMPLAIRES VIERGES

Dans l’attente d’une décision de la Cour de cassation, une agence immobilière a donc tout intérêt à respecter les dispositions des articles L. 121-23 et L. 121-24 du Code de la consommation sous peine de se voir opposer la nullité du mandat qui lui a été consenti.

Cette exigence pose une difficulté supplémentaire pour les agences immobilières lors de l’enregistrement du mandat sur le registre des mandats.

L’article 7 de la loi du 2 janvier 1970 impose sous peine de nullité, une limitation dans le temps de l’effet des mandats, ce qui oblige à connaître précisément sa date de conclusion pour déterminer avec exactitude sa date d’expiration.

Afin de s’assurer que le mandat a bien date certaine, l’article 72 du décret du 20 juillet 1972 prévoit que tous les mandats doivent être mentionnés par ordre chronologique sur un registre des mandats coté sans discontinuité et relié.

Lors de l’envoi du mandat par correspondance, l’agent immobilier dispose de plusieurs options afin d’obtenir la signature de son mandant :

1° Adresser à son mandant un exemplaire du mandat signé par lui mais ne comportant ni le numéro d’inscription sur le registre des mandats, ni la date (qui seront reportés sur les deux exemplaires retournés par le client et signés à réception par l’agent immobilier) qui lui en retournera un exemplaire complété.

2° Adresser à son mandant deux exemplaires du mandat datés et signés par l’agent immobilier et déjà enregistrés dans le registre des mandats avec mention du numéro d’enregistrement sur les deux exemplaires. Le mandant signera les deux exemplaires, en conservera un et renverra l’autre à l’agent immobilier.

3° Adresser à son mandant une convention vierge de toute signature, date et numéro d’inscription au registre des mandats.

Afin de respecter les dispositions de l’article L 121-24 du Code de la consommation selon lesquelles la date du mandat doit être impérativement portée par le client, il convient d’appliquer la troisième option qui consiste à adresser un mandat vierge au client.

L’agent immobilier ne doit donc en aucun cas faire partir un mandat préenregistré, pré-signé et pré-daté.

L’enregistrement du mandat doit donc se faire à la réception, ce qui permet d’éviter tout chevauchement de dates.

Il convient donc désormais pour tout mandat envoyé par correspondance :

1° Qu’il comporte la mention de la première partie et le formulaire de rétractation avec au verso le nom de la société mandataire et son adresse,

2° Que le mandat soit envoyé vierge au client en deux exemplaires, en lui demandant de les retourner après les avoir datés et signés.

3° Qu’à réception des deux mandats datés et signés par le client, l’agent immobilier porte sa signature d’acceptation précédée de la date de réception du mandat,

4° Que la date de réception du mandat soit reportée dans le registre des mandats et le numéro d’enregistrement du registre des mandats soit reporté sur les formulaires au nombre de deux qui ont été envoyés et signés par le client,

5° Que soit renvoyé au client un exemplaire avec le numéro d’enregistrement du registre des mandats.

Cette technique d’enregistrement a pour avantage que la mission de l’agent immobilier ne commencera qu’à la réception du mandat et évitera par conséquent qu’elle ne soit écourtée de la durée des échanges de correspondances.

PLURALITE DE MANDATS ET PLURALITE D’ACQUEREURS

Les vendeurs pensent souvent que consentir une multitude de mandats simples est bien plus avantageux que de consentir un mandat exclusif à une seule agence. Pourtant, un mandat simple conféré à plusieurs agences présente des inconvénients juridiques majeurs.

En effet, tous les agents immobiliers titulaires d’un mandat simple portant sur un même bien ainsi que le mandant peuvent recueillir en même temps une offre d’achat conforme aux prix et conditions de leur mandat.

Ces agences seront alors en conflit estimant toutes être la première à avoir accompli leur mission et exigeant du mandant de signer avec leurs clients.

Selon la jurisprudence, le mandant a le choix de l’acquéreur, c’est-à-dire qu’en cas d’offres simultanées et même à des prix différents, il demeure libre jusqu’à acceptation formelle de donner suite à telle offre plutôt qu’à telle autre. ( « Agent Immobilier » édition Delmas JP n° 3201, CA Paris, 2ème ch.A, 7 janv 2004, RG n°2002/13458 ; jurisprudence qui sera réactualisée dans la 14ème édition).

Mais les acquéreurs potentiels et les agences ne l’entendent pas de la sorte.

Ces situations donnent souvent lieu à des procédures qui peuvent conduire à une immobilisation du bien pendant toute la durée de la procédure.

En effet, le vendeur peut se retrouver dans une procédure longue et coûteuse qui peut durer plusieurs années :

• Face à plusieurs acquéreurs revendiquant la propriété du bien ou des dommages et intérêts,

• Face aux agents immobiliers revendiquant leur droit à commission ou à dommages et intérêts équivalents au montant de leur commission.

En cas de revendication sur la propriété par les acquéreurs, le mandant devra attendre la fin de la procédure pour récupérer la disponibilité de son bien et enfin espérer le vendre.

Même si ces situations ne sont pas automatiques, le mandant doit savoir qu’en consentant des mandats simples il encourt un risque.

Il parait donc plus sécurisant pour le vendeur de confier un mandat exclusif à une seule agence.

LA LOI ALUR ET LA NEGOCIATION IMMOBILIERE

I. DOMAINE DE LA LOI :

La loi ALUR, loi N°2014366 du 24 Mars 2014 vient d’être publiée au Journal Officiel et sa promulgation prend effet à la date du 31 Mars 2014.

Un premier projet de loi étudié par l’ancienne majorité a été abandonné au grand dam des groupements, lesquels ont obtenu de la nouvelle majorité, la mise en forme d’une structure professionnelle proche d’un ordre professionnel règlementé.

Cette loi a modifié les dispositions de la loi du 2 janvier 1970, dite loi HOGUET, laquelle règlemente les activités de négociation immobilière pour le compte de tiers tant en ce qui concerne l’étendu des personnes visées par la règlementation, les organismes de contrôle de la profession, les collaborateurs des agences, les contrats conclus avec des professionnels, les obligations constatées dans ces contrats.

Les professions d’agent immobilier, d’administrateur de biens, de syndic de copropriété font donc l’objet de nouvelles dispositions légales en l’attente de dispositions règlementaires à intervenir par décret.

Par ailleurs, les ventes de lot dépendant d’une copropriété vont être rendues difficiles en raison de l’obligation faite au professionnel d’annexer à l’acte de vente ou à l’avant-contrat des pièces permettant à un éventuel acquéreur, d’être renseigné sur l’état objectif et financier de l’immeuble dont dépend le lot de copropriété vendu.

II.  LA NOUVELLE ORGANISATION DES PROFESSIONS IMMOBILIERES REGLEMENTEES :

Cette nouvelle organisation concerne tous les professionnels immobiliers règlementés à savoir les agents immobiliers, les administrateurs de bien, les syndics de copropriété.

A. Les raisons de la nouvelle organisation (Nouveaux articles 13 à 13-4 de la loi du 2 janvier 1970) :

Il convient de rappeler ainsi que nous l’avions fait dans la revue de la gazette du palais (19 et 20 août 2011 N° 231 à 232, la négociation immobilière et ses incidences au regard de la loi et de la jurisprudence) qu’un syndicat d’Agents Immobiliers représentatif, avait créé un code de déontologie applicable à la transaction immobilière et à l’administration de biens.

N’ayant aucun moyen juridique d’obliger ses adhérents ou les tiers à respecter ces règles déontologiques, ses pouvoirs étant limités par l’article L411-1 du code du travail à la défense des intérêts collectifs de la profession, elle a demandé et aujourd’hui obtenu des pouvoirs publics, la création d’une structure nationale et de structures régionales, chargées d’élaborer et d’appliquer à toute la profession la déontologie et ceci sous peine de sanctions.

Comme nous l’évoquions dans l’article susvisé, une telle organisation est assimilable à un ordre professionnel virtuel, lequel est parfaitement inhabituel dans le secteur du commerce et de l’industrie : les ordres professionnels existants ne concernant habituellement que les professions civiles et libérales.

La composition paritaire de la commission nationale et des commissions régionales dont les membres seront nommés sur recommandation des groupements de la profession et les pouvoirs d’injonction et de sanctions qui leur sont reconnus, permettent de considérer que le législateur a donné naissance à une structure nouvelle, laquelle contrôlera désormais l’exercice de leurs activités, pour les commerçants qui en dépendent.

Cette structuration de la profession nous parait s’harmoniser difficilement avec la directive européenne dite « service » du 12 décembre 2006, laquelle interdit qu’une activité commerciale de service puisse être autocontrôlée.

Nous nous trouvons donc en présence de dispositions posant de délicats problèmes d’adaptation par rapport au droit positif en vigueur tant sur le plan national que sur celui de la communauté européenne.

BLe conseil national de la transaction et de la gestion immobilière

Par analogie avec les ordres professionnels traditionnels, il est affirmé dans les articles 13-1 et suivants de la loi que le nouveau conseil a pour fonction de veiller au maintien et à la promotion des principes de moralité, de probité et de compétence nécessaires au bon accomplissement des activités liées à la transaction et à la gestion immobilière.

Ce conseil aura pour mission de faire des propositions portant sur, la création d’un code de déontologie pour les professionnels, les conditions d’aptitude professionnelle pour l’exercice des activités, les obligations de compétence, la formation continue, la désignation de personne de la profession ayant pris leur retraite susceptible de siéger dans la commission de contrôle régionale prévue par l’article 13-5 de la loi.

Ce conseil sera également consulté par le gouvernement sur l’ensemble des projets législatifs ou règlementaires intéressants la transaction et la gestion immobilière.

Le conseil sera composé majoritairement de représentants des professionnels immobiliers qui seront proposés par les syndicats et unions de syndicats de professionnels représentatifs de la profession.

Le conseil comprendra également des représentants des consommateurs choisis parmi les associations ainsi que de plein droit des membres du gouvernement. (Article 13-2)

L’article 13-4 du même projet, prévoit les sanctions qui pourraient être prises en cas de manquement au code de déontologie, à la probité ou à l’honneur.

L’article 13-4 prévoit que les manquements aux lois, aux règlements et aux obligations du code de déontologie expose le professionnel à des poursuites disciplinaires.

L’article 13-5 prévoit, pour l’exercice de l’action disciplinaire, la création d’une commission de contrôle des activités de transaction et de gestion immobilières en raison des faits commis dans son ressort.

Il est vraisemblable que le décret d’application portera création de commissions de contrôle sur la base d’une répartition départementale ou régionale.

En ce qui concerne la composition des commissions de contrôle, se trouveront a côté des retraités des professions immobilières, des représentants de l’Etat, un magistrat de l’ordre judiciaire, des membres d’une profession juridique ou judiciaire qualifiés dans le domaine de l’immobilier, des représentants des clients (dirigeants d’associations de consommateurs).

Des sections spécialisées pourront être crées au sein de la commission en fonction des activités professionnelles concernées.

Il résulte du rapprochement de toutes ces dispositions que les membres du conseil national seront nommés sur proposition des groupes professionnels et que les membres des commissions régionales chargés d’appliquer des sanctions en cas de manquement déontologique, seront eux-mêmes nommés sur proposition du conseil, ce qui conforte la prépondérance des groupes professionnels,  dans les commissions

La place importante des groupements professionnels au sein du conseil national, même tempérée par la présence de fonctionnaires de l’Etat ou des universités permet de craindre un éclairage corporatiste des dispositions déontologiques qui pourront être adoptées après avis de cet organisme.

Ce risque, se trouve aggravé, à travers les commissions régionales dont les membres sont recommandés par le conseil national et qui seront chargés de sanctionner les manquements des agents immobiliers ou des administrateurs de biens, aux règles déontologiques ou professionnelles

III. LES COMMISSIONS REGIONALES DE CONTROLE

L’article 13-5 de la loi donne compétence aux commissions régionales, vraisemblablement une par département, ou interrégionales pour plusieurs départements, pour connaître de l’action disciplinaire en raison des faits commis dans leur ressort.

Les sanctions qui seront prononcées iront de l’avertissement jusqu’à l’interdiction temporaire ou définitive de l’exercice professionnel. (Article 13-8)

Plus gravement, il est prévu en cas d’urgence une mesure conservatoire, pouvant être prise par le président de la commission, portant sur la suspension de l’exercice des activités du professionnel faisant l’objet des poursuites, et ceci pendant une durée maximum de 1 mois sauf prorogation pouvant aller jusqu’à 3 mois.

Conscient des risques que peut présenter le pouvoir juridictionnel de la commission, le législateur croit nécessaire de rappeler que les sanctions ne peuvent prononcées sans que la personne poursuivie ait pu prendre connaissance du dossier fondant les poursuites et ait été entendue préalablement par le président de la commission.

Cette même commission, en cas d’avertissement ou de blâme, pourra assortir la condamnation prononcée, par des mesures de sureté portant sur le respect d’obligations particulières qui lui seront imposées.

L’appel des décisions se fera devant les juridictions administratives sans la garantie par conséquent de la présence de magistrats de l’ordre judiciaire, juges traditionnels des libertés. (Article 13-9)

L’article 13-4 prévoit que les actions disciplinaires se prescrivent par 5 ans alors que, les infractions commises dans la loi du 2 janvier 1970 faisant l’objet des articles 14 et suivants de la loi sont des infractions pénales de nature délictuelles qui se prescrivent pas trois années.

Il existe donc une contradiction entre les règles de droit générales et les règles particulières résultant de la loi du 2 janvier 1970, un même délit pouvant se prescrire par 3 années dans le cadre du droit commun alors que la prescription sera de 5 années devant la commission de contrôle.

A n’en pas douter, des questions prioritaires de constitutionalité vont être posées en raison de cette contradiction rompant l’égalité des citoyens devant la loi.

Ces dispositions appellent la plus grande réserve, alors que ces commissions, constituent des juridictions d’exception de nature paritaire, chargées d’appliquer non des règles générales résultant de la loi ou des règlements mais des règles particulières exclusivement réservées à l’exercice d’une activité professionnelle dans le secteur de la transaction et de la gestion de biens immobiliers.

Les textes fondant les poursuites de même que les juridictions qui les feront appliquer, ont un caractère d’exception parfaitement inhabituel dans le paysage du droit français.

Les expériences vécues devant les juridictions d’exception ne permettent pas d’envisager sereinement la naissance à côté des juridictions de l’ordre judiciaire d’un ordre de juridiction particulier dont les règles de base et les sanctions seront élaborées et prononcées, par des personnes pouvant ne pas présenter, toutes les garanties nécessaires pour le rendu d’une bonne justice.

Nous rappellerons également que la présence de concurrents commerciaux dans des organismes juridictionnels locaux peut poser des problèmes de partialité, incompatibles avec l’exercice d’une activité juridictionnelle.

Si l’on peut comprendre que des règles particulières puissent voir le jour pour des professions règlementées et que ces règles puissent résulter de la loi ou du règlement, leur application doit être faite, surtout au niveau des sanctions, par des juridictions impartiales qui ne peuvent être que des juridictions de droit commun habituées à protéger les libertés publiques et professionnelles et avec des durées de prescription des infractions unifiées.

Ce nouvel ordre juridictionnel d’exception peut donc paraitre inadapté à une population de commerçants représentant environ 40.000 entreprises en France dont les activités sont parfaitement règlementées à travers la loi du 2 janvier 1970 et son décret du 20 juillet 1972 et sanctionnés en cas d’infractions civiles ou pénales par les juridictions de droit commun ; ou les tribunaux de commerce.

IV. LE NOUVEAU ROLE DES CHAMBRES DE COMMERCE  ET LES CARTES PROFESSIONNELLES (ARTICLE 3):

Alors que traditionnellement la délivrance des cartes professionnelles transaction et gestion immobilières étaient délivrées par l’Etat depuis la loi du 2 janvier 1970, elles le seront désormais par les chambres de commerce et d’industrie territorialement compétentes, lesquelles seront également habilités à contrôler les aptitudes professionnelles et les garanties financières et d’assurances responsabilité civile professionnelle.

Les conditions de délivrance de la carte professionnelle et sa durée de validité feront l’objet d’un décret.

Anticipant déjà sur un risque de partialité pour l’examen des dossiers qui leur seront présentés, l’article 3 de la loi du 2 janvier 1970 modifié prévoit que lorsque le président de la chambre de commerce est lui-même agent immobilier ou administrateur de biens, c’est le vice-président de cette chambre qui examinera le dossier et délivrera la carte.

En effet, ainsi que le reconnait lui-même le législateur, l’impartialité d’un organisme privé n’est jamais garantie contrairement aux garanties d’indépendance que présentent les pouvoirs publics.

Cet aveu implicite, nous permet de conclure qu’un risque de partialité sera toujours rencontré pour l’examen des dossiers qui seront présentés par les professionnels de l’immobilier devant les chambres de commerce.

A ce sujet, il convient de rappeler également la part prépondérante prise dans les syndicats par les structures importantes de transactions et de gestion immobilières à vocation nationale, lesquels appellent les syndicats dont elles sont de gros contributeurs financiers depuis plusieurs années, à réclamer une règlementation autonome permettant de réduire le nombre de professionnels sur le marché afin d’augmenter la valeur de leurs fonds de commerce.

Cette règlementation n’est donc pas prise dans l’intérêt du boutiquier mais dans l’intérêt des structures nationales de l’immobilier tant en ce qui concerne leur rentabilité que leur valeur marchande, sur le marché privé ou en bourse.

Il peut paraitre surprenant, que cet aspect de la règlementation n’ait pas pris en compte les risques résultant d’une règlementation corporative et ait oublié les acquis de la constitution française, laquelle a aboli toute forme de privilèges ou de corporatisme.

Outre, le recours devant le Conseil Constitutionnel qui peut être envisagé en raison de la création d’un ordre virtuel de commerçants inconnu dans notre droit et l’atteinte qui peut être portée à la liberté du commerce valant principe constitutionnel ; des Questions prioritaires de constitutionnalité risquent d’être posée portant sur les règles de droit applicables et le prononcé des sanctions par les commissions et la conformité des nouvelles dispositions avec le droit interne et la directive européenne sur les services.

Il convient de noter que les textes qui serviront de base aux poursuites devant les commissions de contrôle, n’auront ni valeur de loi ou de règlement, alors qu’elles ne seront pas élaborées par le parlement ou le gouvernement mais par des commissions professionnelles contrôlées par des groupements.

V. LES MODIFICATIONS DE DETAILS DE LA LOI DU 2 JANVIER 1970

A. l’article 1-1 de la loi du 2 janvier 1970 :

  • en ce qui concerne les syndics

Cet article a été modifié et vise désormais nommément, dans son 9°, les syndics de copropriété alors que ces derniers étaient déjà implicitement visés par l’activité générale de gestion de biens d’autrui.

  • En ce qui concerne les locations saisonnières :

Au regard de l’article 1er de la loi du 2 janvier 1970, énumérant les activités qu’elles règlementent et au regard de l’article 3 de la loi et 1er du décret du 20 juillet 1972, la pratique s’interrogeait avec des réponses diverses sur la possibilité pour un titulaire de la carte gestion immobilière de rechercher un candidat locataire et d’être rémunéré à l’occasion de la location consentie.

Il était soutenu que l’administrateur de biens ne pouvait conformément à la loi et à l’article 69 du décret du 20 juillet 1972 se livrer à une activité de transaction immobilière que d’une manière occasionnelle et sous réserve de gérer le bien objet de la transaction depuis plus de trois ans.

Désormais, les titulaires de la carte gestion immobilière, alors que cette possibilité se trouvait discutée auparavant, pourront pratiquer les activités  de location saisonnière en nue ou en meublée dès lors que ces activités sont l’accessoire d’un mandat de gestion.

Cette disposition ne peut être qu’approuvée alors, qu’à notre connaissance, il n’existe aucune jurisprudence qui ait fait application de la règlementation dans un sens contraire aux nouvelles dispositions.

B. L’obligation de formation

L’article 3-1 prévoit que la délivrance ou le renouvellement de la carte professionnelle est subordonnée à la justification d’une formation continue reçue conformément aux dispositions d’un décret.

Cette obligation est étendue aux négociateurs immobiliers sans distinction de leur qualité de salarié ou de travailleur indépendant avec le statut d’agent commercial.

Les modalités de cette formation feront l’objet d’un décret.

Pour les agents commerciaux, ils devront désormais contracter une assurance personnelle au titre de la responsabilité civile professionnelle, dont la garantie s’ajoutera à celle donnée par leur mandant dans le cadre de leur propre contrat d’assurances. (article 4-2)

Il convient de rappeler à ce sujet que la plupart du temps les agents commerciaux qui n’ont aucune existence autonome par rapport à leur mandant titulaire de la carte professionnelle, sont couverts par l’assurance de leur mandant lorsqu’ils travaillent pour son compte.

Le législateur a voulu dans l’intérêt de la protection du public que désormais les négociateurs immobiliers suivent une formation homologué par décret, et que ceux qui n’ont pas la qualité de salarié ajoutent à cette obligation de formation une obligation d’assurances.

C. Les pouvoirs des agents commerciaux

Dans un article (les limites de l’intervention des négociateurs immobiliers ayant le statut d’agent commercial, gaz. Pal 24/25 février 2012, numéro 55 à 56), nous évoquions le statut spécifique des agents commerciaux et les limites de leurs interventions, lesquelles ne pouvaient concerner qu’un titulaire de la carte professionnelle transaction immobilière, à l’exclusion de tout autre mandant.

Dans le même article, nous évoquions le risque créé par les agents commerciaux exerçant leurs activités pour le compte d’une entreprise à vocation nationale lesquelles, sans aucune possibilité de surveillance de leurs activités par leur mandant éloigné du lieu de leur exercice professionnel, représentaient un risque pour le consommateur, leur compétence professionnelle n’étant ni surveillée ni garantie.

Nous évoquions à ce sujet la règlementation, des bureaux, succursales ou agences, en considérant que l’éloignement du titulaire de la carte professionnelle par rapport à son représentant agent commercial, faisait de ce dernier le responsable d’une succursale soumise à déclaration auprès de la préfecture en application de l’article 3 de la loi du 2 janvier 1970.

Il semblerait que le législateur nous ait donné raison puisqu’à côté des limitations de pouvoir déjà prévues par la règlementation en ce qui concerne la réception des fonds et les consultations juridiques et avant contrat, l’agent commercial se voit interdire la direction d’un établissement d’une succursale d’une agence ou d’un bureau.

Fort curieusement, le législateur prévoit que cette interdiction de direction d’une succursale ne serait pas applicable aux négociateurs qui se trouvaient habilités à le faire antérieurement à l’entrée en vigueur de la loi.

Cette disposition nous paraît devoir viser les négociateurs salariés à l’exclusion des agents commerciaux lesquels ne peuvent en tant que travailleurs indépendants assurer la direction d’une succursale dans un état subordonné.

D. La nouvelle réglementation des mandats

L’article 6 de la loi du 2 janvier 1970 se trouve modifié par une disposition précisant  qu’en cas d’exclusivité conféré par le mandant, le mandataire devra insérer dans le mandat le détail des actions qu’il devra réaliser pour son accomplissement et les modalités suivant lesquels il devra informer son mandant des actions réalisées pour son compte, le mandat devant également préciser la périodicité de ses informations.

Dans les mandats exclusifs figurent généralement une clause pénale sanctionnant le fait pour le mandant de traiter la vente de son bien pendant le cours de l’exclusivité soit directement soit avec le concours d’un tiers. (article 6-1)

Le législateur a voulu modifier cette disposition en autorisant la présence d’une clause pénale mais en limitant ses effets à un montant maximum qui sera fixé par un décret d’application à paraître.

Ainsi, les prévisions du contrat ne feront plus la loi des parties, le montant des indemnités que pourra réclamer le mandataire étant limité dans leur montant ce qui est de nature à faciliter les fraudes du mandant lequel connaîtra par avance les dommages et intérêts dont il peut être redevable, en cas de fraude, à l’égard de son mandataire.

E. Publicités des honoraires (article 6-1):

Toutes ces publicités devront comporter le montant TTC de la rémunération d’entremise à la charge de chacune des parties en précisant celles ou celui qui ont à la charge.

Pour les ventes, le montant de la rémunération doit être exprimé en pourcentage TTC du montant du prix demandé par le mandant et pour la location, la quote-part des honoraires TTC à la charge du locataire.

F. Limitation dans le temps des mandats (article 7) :

Tout d’abord, le mandat conféré à des fins non professionnelles à titre de mandat simple doit reproduire de manière lisible les dispositions du code de la consommation concernant la possibilité de mettre fin à un contrat comportant une clause de tacite reconduction.

Pour les mandats exclusifs le contrat doit reproduire de manière apparente les dispositions de l’article 78 alinéa 2 du décret du 20 juillet 1972 permettant de mettre fin au mandat à tout moment passé trois mois à compter de sa signature en respectant un préavis de 15 jours.

De ce fait, le mandataire ne peut pas résilier le mandat pendant le cours des 3 mois fermes mais ne pourra le faire que les trois mois écoulés ce qui portera au minimum la durée du mandat à 3 mois (durée ferme) et 15 jours (préavis).

G. Liens capitalistiques et juridiques :

Les professionnels doivent informer leurs clients des liens capitalistiques et juridiques qu’ils peuvent avoir avec des établissements bancaires, des sociétés financières ou même des entreprises pouvant intervenir au profit de leurs clients.

Il en va de même des liens de même nature qu’ils peuvent avoir avec les dirigeants des entreprises.

H. Les marchands de liste :

L’article 6-1 est modifié et prévoit que pour les marchands de liste bénéficant d’une clause d’exclusivité fixant une période pendant laquelle le propriétaire ne peut vendre ou louer par l’intermédiaire d’un autre professionnel ou par lui-même ; le mandat conféré doit prévoir les conditions de remboursement  des sommes payées par le client lorsque la prestation fournie ne correspond pas à celle prévue dans le mandat.

Les conditions d’application seront précisées par décret.

I. Sanctions pénales et administratives :

L’article 14 de la loi est complété pour prévoir une sanction pénale de 6 mois d’emprisonnement et une amende en cas d’infraction à une interdiction définitive ou temporaire d’exercer la profession.

Les articles 17- 1 et 17-2 de la loi prévoient une amende administrative sanctionnant la mise en location d’un logement frappé d’un arrêt d’insalubrité ou de péril.

Une amende est également prévue pour l’agent commercial qui ne mentionnerait pas cette qualité dans les documents lors de son intervention et pour le titulaire de la carte professionnelle, le fait de passer une publicité sans respecter les prescriptions légales.

J. Les actes de vente portant sur un lot de copropriété :

Il convient de noter que la loi dite ALUR Loi N° 2012 -366 du 24 mars 2014, laquelle vient d’être promulguée, devient immédiatement applicable pour la partie de cette loi, ne faisant pas l’objet d’un délai d’application ou se trouvant dans l’attente d’un décret d’application.

Désormais, de nombreux documents devront être annexés aux avant-contrats et aux actes de vente définitifs portant sur la vente d’un lot de copropriété, ainsi qu’il est prévu par les articles L721-2 et L721-3 nouveaux du code de la construction et de l’habitation.

Il est prévu à l’article L.721-2 l’obligation d’annexer à la promesse de vente ou à défaut à l’acte authentique de vente et ceci en sus des diagnostics techniques les documents suivants, dans le souci de parfaitement informer l’acquéreur de l’état de l’immeuble et des obligations qui vont peser sur lui en application du règlement de copropriété.

Il s’agit de :

« 1° En ce qui concerne les documents relatifs à l’organisation de l’immeuble:


« a) La fiche synthétique de la copropriété prévue à l’article 8-2 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis ;


« b) Le règlement de copropriété et l’état descriptif de division ainsi que les actes les modifiant, s’ils ont été publiés ;



« c) Les procès-verbaux des assemblées générales des trois dernières années, si le copropriétaire vendeur en dispose ;


« 2° En ce qui concerne les documents relatifs à la situation financière de la copropriété et du copropriétaire vendeur


« a) Le montant des charges courantes du budget prévisionnel et des charges hors budget prévisionnel payées par le copropriétaire vendeur au titre des deux exercices comptables précédant la vente ;


« b) Les sommes pouvant rester dues par le copropriétaire vendeur au syndicat des copropriétaires et les sommes qui seront dues au syndicat par l’acquéreur ;


« c) L’état global des impayés de charges au sein du syndicat et de la dette vis-à-vis des fournisseurs (sauf lorsque le syndicat comporte moins de 10 lots et a un budget prévisionnel moyen sur une période de trois exercices consécutifs, inférieur à 15.000 euros au sens du deuxième alinéa de l’article 14-3 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965


« d) Lorsque le syndicat des copropriétaires dispose d’un fonds de travaux, le montant de la part du fonds de travaux rattachée au lot principal vendu et le montant de la dernière cotisation au fonds versée par le copropriétaire vendeur au titre de son lot.


« 3° Le carnet d’entretien de l’immeuble



« 4° Une attestation comportant la mention de la superficie de la partie privative et de la surface habitable de ce lot ou de cette fraction de lot, prévues à l’article 46 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 ;


« 5° Une notice d’information relative aux droits et obligations des copropriétaires ainsi qu’au fonctionnement des instances du syndicat de copropriété. Un arrêté du ministre chargé du logement détermine le contenu de cette notice ;


« 6° Le cas échéant, le diagnostic technique global prévu à l’article L. 731-1 et le plan pluriannuel de travaux prévu à l’article L. 731-2.

Documents à annexer à court ou moyen terme :

A court ou moyen terme d’autres documents devront être annexés à la promesse de vente ou, à défaut de promesse, à l’acte authentique de vente à savoir :

Une notice d’information relative aux droits et obligations des copropriétaires ainsi qu’au fonctionnement des instances du syndicat de copropriété devra être établie et annexée, dès que le ministre chargé du logement aura pris l’arrêté pour en déterminer le contenu.

Au plus tôt trois mois après la promulgation de la loi ALUR, devra être annexée une attestation comportant la mention de la superficie de la partie privative et de la surface habitable de ce lot ou de cette fraction de lot, prévues à l’article 46 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965. A cet égard, il faut signaler que la superficie de la partie privative et de la surface habitable seront définies par décret en Conseil d’État.

A compter du 31 décembre 2016, pour les syndicats de copropriétaires comportant plus de 200 lots, il conviendra d’annexer à la promesse et à défaut de promesse à l’acte authentique de vente : la fiche synthétique de la copropriété prévue à l’article 8-2 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis.

Pour les syndicats de copropriétaires comportant plus de 50 lots la fiche synthétique devra être annexée à compter du 31 décembre 2017, et pour les autres syndicats de copropriétaires à compter du 31 décembre 2018.

A compter du 1er janvier 2017, le cas échéant, le diagnostic technique global prévu à l’article L. 731-1 et le plan pluriannuel de travaux prévu à l’article L. 731-2 seront à annexer.

Il convient de noter qu’aucune sanction spécifique n’est prévue en cas de documents manquants, telle que la nullité de l’engagement des parties mais, quand bien même la promesse de vente est effectivement conclue, le délai de rétractation ou de réflexion de l’acquéreur prévu par l’article L171-1 du CCH ne commencera à courir qu’à compter du jour ou la  totalité des documents auront été communiqué à ce dernier.

En l’état, les documents qui doivent être joints à la notification purgeant le délai de rétractation de l’acquéreur sont à ce jour :

Le règlement de copropriété et l’état descriptif de division ainsi que les actes les modifiant, s’ils ont été publiés ;

Les procès-verbaux des assemblées générales des trois dernières années, si le copropriétaire vendeur en dispose ;

Les documents relatifs à la situation financière de la copropriété et du copropriétaire vendeur :

a)    Le montant des charges courantes du budget prévisionnel et des charges hors budget prévisionnel payées par le copropriétaire vendeur au titre des deux exercices comptables précédant la vente ;

b) Les sommes pouvant rester dues par le copropriétaire vendeur au syndicat des copropriétaires et les sommes qui seront dues au syndicat par l’acquéreur ;

c)  L’état global des impayés de charges au sein du syndicat et de la dette vis-à-vis des fournisseurs ;

d) Lorsque le syndicat des copropriétaires dispose d’un fonds de travaux, le montant de la part du fonds de travaux rattachée au lot principal vendu et le montant de la dernière cotisation au fonds versée par le copropriétaire vendeur au titre de son lot.

Etant précisé que lorsque le syndicat des copropriétaires relève de l’article 14-3 de la loi N° 65 567 du 10 juillet 1965 (moins de 10 lots et un budget prévisionnel moyen sur une période de trois exercices consécutifs inférieur à 15.000 euros, les documents prévus par les paragraphes b et c n’ont pas à être communiqués

La loi est entrée en vigueur et s’applique donc à toutes les ventes ou avant-contrats conclus depuis sa promulgation.

Si une promesse de vente avait été conclue avant l’entrée en vigueur de la loi, l’acte authentique de vente qui réitèrera la promesse n’est pas soumis à ces nouvelles obligations dans la mesure où  les exigences d’annexion de documents ne concerne que les ventes qui n’ont pas été précédées d’un avant contrat.

Il en irait de même pour la notification d’un avant-contrat établi avant l’entrée en vigueur de la loi et faisant l’objet d’une notification à l’acquéreur postérieurement à sa promulgation.

Il restera à prouver la date certaine de l’acte signé antérieurement à la promulgation de la loi ce qui ne posera pas de problème pour les actes authentiques mais posera un problème pour les actes sous seing privé n’ayant pas acquis date certaine soit par l’enregistrement soit d’autres manières.

Il apparait donc aujourd’hui de nouvelles complications en ce qui concerne la stabilité des relations contractuelles à l’occasion de la signature d’un avant-contrat  portant sur la vente d’un bien immobilier en copropriété.

Les annexes qui devront être notifiées à l’acquéreur, en plus de l’avant-contrat signé par les parties, aux fins de purger son droit de rétractation sont nombreuses et volumineuses si l’on se réfère au poids du règlement de copropriété de l’immeuble et ses éventuels modificatifs.

Il convient également de craindre l’inertie du syndic gestionnaire ou même sa carence pour la production des documents.

Les sources de responsabilité pour les rédacteurs d’actes, vont être alimentées par de nombreux litiges tenant notamment à des retards d’exécution des promesses, ou leur rétractation par l’acquéreur, en raison de l’insuffisance des documents qui lui ont été notifiés.

Ces nouvelles dispositions s’ajoutant aux dispositifs de protection des emprunteurs immobiliers  sans compter les droits de préemption, vont retarder la conclusion des ventes immobilières.

En ce qui concerne les droits de préemption,  les nouvelles dispositions de l’article 10 de la loi du 31 décembre 1975, prévoient que, lors de la première vente d’un lot après la mise en copropriété de l’immeuble, le locataire ou l’occupant de bonne foi renonçant à acquérir l’appartement qu’il occupe au prix offert, le propriétaire devra désormais notifier à la commune les prix et conditions de la vente proposée, pour permettre à cette dernière d’exercer le nouveau droit de préemption qui lui est reconnu,  dans les conditions prévues par le code de l’urbanisme dans ses article L 211 et suivants.

De ce fait , la première vente d’un lot de copropriété sera soumise à un délai de préemption du locataire de 4 mois s’il demande un crédit, suivi, s’il n’achète pas,  d’une notification à la commune ajoutant un nouveau délai de préemption au profit de cette dernière d’une durée de deux mois, soit au total, plus de sept mois au moins, avant de pouvoir consentir une vente portant sur la première vente d’un lot de copropriété.

CONCLUSION

La partie la plus étonnante de cette nouvelle règlementation des professions immobilières porte sur l’exigence d’une déontologie exclusive et particulière à la transaction immobilière et à l’administration de biens.

Cette déontologie particulière nous parait surprenante alors que la loi du 2 janvier 1970 et le décret du 20 juillet 1972, nous paraissent constituer un corps de règlementation suffisant pour la protection des professionnels et du public.

Les pouvoirs publics ont cédé à la pression des groupements immobiliers pour accepter la création  d’un ordre virtuel des professions immobilières pouvant expliquer la prise d’une règlementation déontologique sanctionnée par un organe professionnel dédié sous la surveillance des juridictions administratives.

Ces dispositions d’exception semblent inhabituelles alors que l’entrée dans la profession fait l’objet d’un examen corporatiste de même que l’exercice de la profession et les condamnations sanctionnant les fautes.

Le remplacement des préfets par les présidents des chambres de commerce pour la délivrance des cartes professionnelles ne peut rassurer et donner aux professionnels le sentiment d’une impartialité garantie.

Enfin, un nouveau chemin de croix sera parcouru par les professionnels lors de la vente d’un lot de copropriété, avec de nombreuses stations chez les tiers pour recueillir la masse des documents qui devront être annexés à l’avant-contrat ou à l’acte de vente.

Il convient d’espérer que leurs souffrances seront récompensées autrement que par des sanctions disciplinaires sous le contrôle des juridictions administratives.

LE LOYER DES CLINIQUES DEPUIS LA REFORME T2A

I           RAPPEL  HISTORIQUE

Traditionnellement en France et jusqu’ à la fin des années 1980 qui ont vu apparaitre le début de la  chirurgie moderne, et les déficits abyssaux de la sécurité sociale, le chirurgien de ville d’importance moyenne de même que les chirurgiens des grandes villes, étaient considérés comme de « grands patrons » et à ce titre exerçaient leurs activités à la fois à l’hôpital public du ressort et dans une clinique privée doublant le service hospitalier public.

A partir des années 60, les praticiens pour l’essentiel des généralistes, pratiquant aussi bien la chirurgie viscérale que la chirurgie osseuse ont été remplacés par des spécialistes pratiquant uniquement un type de chirurgie comme, le système digestif, la cardiologie, la neurologie, alors que la chirurgie osseuse se spécialisait elle-même par branches, articulaires, vertébrales, fractures complexes etc…

C’est à partir de cette époque que se sont constituées des équipes chirurgicales attachées à des cliniques privées dont elles assuraient la prospérité.

La rentabilité des cliniques dépendait essentiellement des jours d’hospitalisation assurant à l’exploitant un revenu hôtelier important par l’occupation des chambres.

Il convient de se rappeler qu’à cette époque était pratiquée une chirurgie traumatisante et saignante alors que l’on ne connaissait pas encore la chirurgie par endoscopie, laquelle n’a pu être pratiquée par la suite qu’en raison des progrès du matériel technique mis à la disposition des chirurgiens.

De ce fait, les cliniques qui ont été construites en grand nombre à cette époque, ont été conçues dans l’optique d’une chirurgie classique avec un grand nombre de lits, les actes chirurgicaux nécessitant une longue hospitalisation du patient avec tous les services hôteliers nécessaires à son bien-être et son rétablissement.

Ce parc de cliniques toujours en activité à l’heure actuelle, se trouve surdimensionné, alors que les actes chirurgicaux même les plus sérieux, ne nécessitent plus de longues hospitalisations, la chirurgie moderne étant bien moins traumatisante que celle qui était pratiquée auparavant.

Un accouchement ou une appendicite ne requiert aujourd’hui qu’une hospitalisation de courte durée soit deux ou trois jours maximum.

Les remboursements de la sécurité sociale ne sont plus calculés à la journée d’hospitalisation mais à l’acte chirurgical depuis la réforme T2A qui remonte à l’année 2005.

Face à l’investissement immobilier surdimensionné, les cliniques doivent s’équiper avec des matériels de plus en plus perfectionnés et couteux pour donner aux patients les soins qu’ils sont en droit d’attendre d’une médecine et d’une chirurgie moderne.

Les cliniques hôtelières du passé n’étant plus rentables, en raison du coût des équipements notamment radiologiques, auquel s’ajoutent  la baisse des remboursements de la sécurité sociale et l’augmentation des charges sociales de travail, les exploitants deviennent très attentifs au poids que représentent, pour leur exploitation, les loyers qu’ils acquittent au titre des murs de la clinique.

II          LA PROPRIETE DES MURS DES CLINIQUES

Au début du siècle, le grand patron était propriétaire du terrain et des murs de sa clinique où il exerçait seul son art en pratiquant la chirurgie générale traditionnelle.

A partir des années 60, l’exploitation d’une clinique nécessitait la présence de praticiens spécialisés associés à la réussite de l’entreprise et participant aux investissements nécessaires au succès.

Généralement, la construction de la clinique se trouvait assurée par la totalité des chirurgiens qui lui était rattachée, lesquels constituaient une structure destinée à recevoir la propriété des murs dont la construction était réalisée grâce à des emprunts bancaires pour le remboursement desquels ils se portaient caution.

Cette technique de pierre hors bilan par opposition à une acquisition des murs par la société d’exploitation de la clinique, appelé généralement « pierre au bilan », avait pour but de séparer la propriété des murs de la clinique de sa structure d’exploitation.

Pour rembourser l’emprunt, nécessaire à la construction, la structure d’exploitation versait à la structure propriétaire des murs, un loyer correspondant à peu près au montant des remboursements d’emprunts, l’opération étant indolore pour les investisseurs en raison d’un taux d’imposition très favorable aux revenus fonciers et l’absence de risque d’impayé des loyers par la structure d’exploitation largement bénéficiaire.

Le plus souvent, la propriété des murs étaient recueillie par une société civile immobilière composée au niveau de ses associés, par les chirurgiens et médecins exerçant au sein de la structure d’exploitation.

Par ce moyen, les praticiens se constituaient une retraite complémentaire d’autant plus confortable que les emprunts se trouvaient remboursés.

De ce fait, les associés des structures propriétaires de murs de cliniques ont pris l’habitude de percevoir des revenus fonciers conséquents dès que l’emprunt nécessaire à la construction se trouvait remboursé et partant, l’intégralité des loyers versée aux associés.

Tant que la sécurité sociale remboursait les journées d’hospitalisation à l’unité jour, les recettes des cliniques étaient suffisantes pour permettre le paiement de loyers importants calculés, non à partir d’une valeur locative normale, mais à partir du montant du remboursement de l’emprunt lié à la construction de l’immeuble.

Les choses ont changé avec l’instauration du système T2A lequel se caractérise par un remboursement effectué par la sécurité sociale en fonction des actes médicaux et pour des périodes d’hospitalisation limitées par la pratique d’une chirurgie moderne.

De plus, les murs des cliniques et leurs équipements qui avaient été conçus à l’époque de la chirurgie ancienne se sont révélés inadaptés pour l’exercice d’une chirurgie n’exigeant que des périodes d’hospitalisation très courtes.

Les cliniques se sont trouvées surdimensionnées, obsolètes et coûteuses en présence  d’espaces partiellement occupés et souvent inadaptés aux exigences de la médecine moderne.

Un conflit a donc rapidement opposé les médecins retraités ou leurs héritiers qui contrôlent les sociétés civiles propriétaires des murs et le personnel médical qui les a remplacés dans la société d’exploitation de la clinique.

Ce conflit porte sur la diminution du loyer afin de permettre de moderniser la structure de la clinique et ses équipements, alors que les revenus des sociétés d’exploitation des cliniques ne cessent de diminuer depuis l’année 2005, suite à l’instauration par la sécurité sociale du remboursement à l’acte.

III         LE PARC IMMOBILIER DES CLINIQUES NE CESSE DE DECLINER

En 1994 il résulte des publications de l’observatoire économique et financier des cliniques privées françaises que en 1992 il existait 1014 établissements, en 2009, 579 établissements alors qu’en 2010 le nombre d’établissements a chuté à 570 établissements.

En moins de vingt ans, le nombre des cliniques s’est trouvé divisé par deux, soit par des fermetures, soit par des regroupements.

L’autorisation de construire des cliniques étant très difficile à obtenir, il est devenu indispensable de pouvoir restructurer les établissements existants pour les adapter à une médecine moderne soit ambulatoire, soit de courte hospitalisation.

Les ressources des cliniques et leurs marges bénéficiaires allant en s’amenuisant alors que selon les même sources, 72 % des établissements se situent en dessous du seuil de résultats de 3%, 35% étant en déficit, il est indispensable de revoir les méthodes d’évaluation des loyers des cliniques pour leur permettent de pouvoir faire face à une restructuration de l’immobilier accompagnée de l’acquisition des équipements nécessaires, cette restructuration et ces équipements permettant d’améliorer les recettes d’exploitation.

Un conflit oppose donc aujourd’hui les propriétaires des murs aux associés des sociétés d’exploitation des cliniques, lequel ne peut se résoudre qu’en adoptant des méthodes d’évaluation du loyer des cliniques tenant compte des nouvelles contraintes résultant de l’adaptation du parc  immobilier existant, du coût de cette adaptation, du coût des équipements, des remboursements de plus en plus limités pour les périodes d’hospitalisation.

Il convient de noter que depuis une vingtaine d’années des groupes financiers importants investissent en rachetant des cliniques, soit afin de les rentabiliser soit afin de les restructurer ou les réunir par suppression des existants et constructions de bâtiments modernes parfaitement adaptés à la chirurgie moderne.

Il reste cependant, aujourd‘hui un grand nombre de cliniques toujours exploitées dans le cadre du schéma ancien, les murs restant la propriété des praticiens fondateurs et de leurs héritiers, alors que la société d’exploitation se trouve détenue par de nouveaux praticiens obligés d’acquitter un coût de l’immobilier constituant une charge importante des résultats d’exploitation.

La méthode hôtelière anciennement utilisée pour fixer le loyer des cliniques est aujourd’hui totalement inadaptée aux réalités de leurs exploitations et, le niveau élevé des loyers résultant du remboursement du coût de la construction par les fondateurs n’est plus supportable.

IV        LA FIXATION DU LOYER DES CLINIQUES AU REGARD DES BAUX COMMERCIAUX.

Les murs de clinique sont par définition ce qu’on appelle des locaux monovalents, c’est-à-dire des locaux qui ont été construits pour le seul usage de cliniques médicales ou chirurgicales. En effet, la transformation de ces locaux pour un autre usage nécessiterait la réalisation de travaux importants et coûteux. Par application de l’article R 145-10 du code de commerce, la valeur locative des locaux monovalents n’est pas fixé conformément aux critères d’évaluation tels que précisé par l’article L. 145-33 du code de commerce, mais simplement en fonction des usages observés dans la branche d’activité considérée.

A l’époque ancienne, on utilisait principalement les recettes hôtelières pour évaluer le loyer des cliniques, du fait de la concordance entre le nombre de lits et les recettes d’hospitalisation, ce qui rapprochait les cliniques des hôtels.

Cette méthode hôtelière n’est plus utilisable aujourd’hui. En effet, les remboursements de la sécurité sociale ne sont plus calculés en fonction de journées d’hospitalisation, mais en fonction des actes médicaux et chirurgicaux. De plus, une grande partie de la chirurgie actuelle est ambulatoire, sans nécessité d’hospitalisation du patient, lequel ressort le jour même de l’intervention. Les autres actes chirurgicaux, même importants, ne nécessitent plus que des durées d’hospitalisation réduites.

De ce fait, la rentabilité des cliniques est conditionnée par la réalisation du plus grand nombre d’actes chirurgicaux dans un  temps aussi réduit que possible avec pour corollaire une rotation importante des patients. Ces derniers ne séjournent plus aussi longtemps dans la clinique suite à l’intervention.

Les anciennes méthodes d’évaluation du loyer, en usage pour les cliniques, doivent donc être revues en fonction de la réalité des actes, mais aussi en fonction de l’inadaptation d’un immobilier trop vaste, obsolète et onéreux, pour les praticiens.

Il convient donc d’opérer une réflexion permettant de dégager de nouveaux usages pour la fixation et la révision du loyer des cliniques. Tel sera l’objet des développements qui vont suivre.

V         PROPOSITION DE NOUVEAUX USAGES POUR LA DETERMINATION DU LOYER DES CLINIQUES

La tarification à l’activité (T2A) a eu pour conséquence la déconnection de la valorisation de l’immeuble avec celle de son activité puisque le chiffre d’affaires d’une clinique dépend de la pathologie de ses patients et non plus de la durée du séjour.

Le premier paradoxe de cette réforme, censée induire des économies dans l’assurance maladie, consiste en l’attractivité persistante des murs de cliniques pour les professionnels de l’immobilier, toujours rémunérés par les loyers issus de baux historiques avec les utilisateurs de la clinique. En dépit des difficultés et des restructurations, le rendement locatif net des cliniques, tel qu’il est escompté par les foncières, se situe entre 6,5% et 7,5% de la valeur de l’actif acheté (source IGAS rapport 2012). Le coût moyen du m² est stable aux environs de 114 euros/m²/an. Le coût de l’immobilier rapporté au lit est de 8 670 euros en 2012.

Le second paradoxe tient au fait que les renouvellements de baux ne donnent actuellement lieu qu’à peu de procédures et que les négociations amiables priment sur toute autre action contentieuse.

Mais qu’en sera-t-il prochainement ? Nul ne le sait à l’heure où les pouvoirs publics remettent en cause des autorisations d’activité fragilisant certains établissements. Nul ne le sait non plus face à un effort sans précédent des cliniques pour rationaliser leur activité et dont la seule latitude demain pour améliorer leur compte sera de négocier le loyer !

Quel est le fondement légal de la fixation d’un loyer pour un local monovalent ?

L’article L 145-36 du Code de Commerce précise que « le prix du bail des locaux construits en vue d’une seule utilisation peut, par dérogation aux dispositions qui précèdent, être déterminé selon les usages observés dans la branche d’activité considérée ».

Personne ne peut contester le fait que les cliniques sont des locaux monovalents. Personne non plus ne peut nier, depuis l’application de la T2A, l’absence d’un véritable usage codifié dans l’ensemble de la profession du secteur hospitalier privé.

Quelles seraient les méthodes adaptées pour évaluer un loyer lors d’un renouvellement de bail? Cette problématique s’applique aujourd’hui uniquement aux établissements privés, même si l’hôpital public est lui aussi soumis au même régime de la T2A. Avant de proposer des solutions revenons un instant sur l’état de la Jurisprudence rendue depuis la nouvelle tarification.

VI ETAT DE LA JURISPRUDENCE

Quelques décisions ont été rendues :

1/ TGI Tours 27 mai 2010 (SA A DIRECTOIRE CLINIQUE VELPEAU C/ SAS MAISON DE SANTE VELPEAU) : dans cette espèce, après avoir transformé cet établissement de clinique chirurgicale à une activité de soins de suite (SSR), le preneur engage une action au titre de l’article 145-39 du code de commerce pour une révision à la baisse du loyer. Dans cette affaire, la méthode métrique prévaut pour le Tribunal. Ce Jugement est confirmé par un Arrêt de la Cour d’Appel d’Orléans (26 mai 2011).

Le TGI avait considéré que le bailleur n’avait pas à subir pour le calcul du loyer qui lui est du « la référence à des critères totalement aléatoires et extrinsèques à son immeuble (équipement compétences, installations techniques variation des tarifications internes, honoraires, vacations, renégociations de tous éléments liés à la mise en place de la tarification à l’activité ou à la pathologie depuis 2005, T2A contrôles et injonctions diverses des autorités de tutelle) »… « dès lors la seule méthode recevable non arbitraire et non aléatoire à retenir pour fixer le prix est celle dite métrique…»

La Cour de Cassation, par un arrêt du 11 décembre 2012, rejette le pourvoi.

Cet arrêt admet:

  • la méthode de la surface pondérée comme mode de détermination du loyer;
  • la pondération à 1 du bâtiment principal.

Toutefois:

  • Cet arrêt n’est pas publié, il est simplement diffusé (ne peut donc servir de référence en jurisprudence).

La Cour de Cassation se réfugie derrière le « pouvoir souverain d’appréciation » du juge du fond. Cet arrêt ne valide pas les méthodes retenues contre la cour d’appel mais ne trouve rien à redire. Il n’y a pas de réponse sur cet aspect méthodologique.

2/ TGI Paris 5 décembre 2011 (SCI Foncière Chevaleret Cantagrel C/ SA CLINIQUE JEANNE D’ARC) : dans cette deuxième espèce, le Tribunal adopte la méthode métrique et le TGI insiste que faute d’usages relevés dans l’article R. 145-10 la règle de l’article L. 145-33 du code de commerce s’applique et le loyer est fixé à la valeur locative.


3/ TGI Paris 21 juin 2011 (SCI AVENUE 17ème C/ Société CLINIQUE CHIRURGICALE DAUTANCOURT) :  dans cette troisième espèce, le Tribunal adopte la méthode métrique tout en reconnaissant la possibilité d’adopter la méthode dite du Chiffre d’affaires (GHS) si les données avaient pu être exploitées et le TGI insiste que faute d’usages relevés dans l’article R. 145-10 la règle de l’article L. 145-33 du code de commerce s’applique et le loyer doit être fixé à la valeur locative.

4/CA d’Aix en Provence du 28 mars 2013 : dans cette quatrième espèce, la méthode métrique est adoptée car elle est, pour la Cour d’Appel, indépendante du chiffre d’affaires réalisé et elle rend compte de la nature du bâtiment occupé. Elle a exclu les méthodes fondées sur l’EBE et celle fondée sur le chiffre d’affaires théorique attaché à la partie immobilière.

Ces Jugements rendus concernent des situations relativement comparables et reflètent bien l’état de la jurisprudence sur plusieurs questions en suspens à la suite de la mise en application de la T2A.

En constatant l’absence d’usage, ces décisions ont clos le débat relatif à l’existence d’usages éventuels pour la fixation du loyer des cliniques.

Cette absence reconnue d’usage a naturellement conduit le Juge à revenir aux méthodes classiques d’évaluation du loyer, notamment par l’application de la méthode métrique sans pour autant exclure d’autres méthodes dès lors qu’elles puissent s’appliquer sur la base de données fiables.

VII  ETAT DE LA POSITION DOCTRINALE

Faut-il se limiter à la méthode métrique ? Peut-on la confronter à d’autres méthodes?

Dans des articles publiés à la suite de l’application de la méthode T2A, l’expert Mignot prenait acte de l’impossibilité de se référer au chiffre d’affaires dans la mesure où il est très difficile de distinguer le chiffre d’affaires résultant de la propriété des murs de celui de la seule activité exercée par le preneur. Il proposait de prendre la méthode de rentabilité pour les biens appartenant au propriétaire et concluait que « toute autre méthode serait inappropriée et inéquitable ».

L’expert Michel Marx proposait de retenir le prix au lit, une quote-part de la recette globale ou la méthode métrique qu’il semble privilégier en écrivant que « la prise en compte des locaux de même nature relèvent bien de l’article 145-10 ».

L’expert José Martins, dans son intervention à l’université d’automne de la CNEJI, proposait la méthode métrique malgré ses limites. Il envisageait également la méthode de l’Excédent Brut d’Exploitation (EBE), permettant de prendre en compte « les capacités contributives de l’établissement », et aussi la méthode du chiffre d’affaires théorique immobilier, qui consiste à ne prendre en compte que le chiffre d’affaires lié à l’actif immobilier « utilisatrices de m² » auquel on applique un taux d’effort compris entre 6 et 13% de ce chiffre d’affaires pour la détermination du loyer.

Au sein des propositions de ces professionnels, force est de constater l’utilisation conjointe de plusieurs méthodes lorsque cela est possible : méthode métrique, méthode du chiffre d’affaires, méthode de l’Excédent Brut d’Exploitation ou autre méthode de rentabilité.

Ces méthodes sont-elles conciliables pour la fixation d’un loyer renouvelé ?

Pour exploiter ce débat d’experts, il convient d’appréhender la portée de ces différentes méthodes autres que métrique, qui intègrent in fine une notion de rentabilité. C’est bien entendu le cas des méthodes basées sur l’EBE ou de la capitalisation, mais aussi sur une méthode basée sur le chiffre d’affaires.

Par exemple, la méthode dite du CATI (Chiffre d’Affaires Théorique Immobilier) exprime une valeur en pourcentage d’un chiffre d’affaires retraité. La détermination de ce pourcentage intègre implicitement une notion de rentabilité.  Admettre qu’un loyer d’une première clinique vaut un certain pourcentage du chiffre d’affaires retraité alors que le loyer d’une seconde clinique est appréhendée à partir d’un autre pourcentage équivaut à apprécier comparativement les rentabilités de ces deux cliniques respectives. De surcroît, il est bien admis que s’agissant des locaux monovalents, le bailleur ne peut occulter totalement l’activité réellement exercée dans les lieux.

Revenons sur le panel de méthodes disponibles :

  1. La méthode métrique : elle consiste à dégager une superficie pondérée et à multiplier le résultat observé par un prix au mètre carré de biens comparables. Elle se doit de respecter la règle des trois unités : l’unité de lieu (disposer de loyers comparables et pertinents dans une zone géographique la moins étendue possible) ; l’unité de temps (disposer de loyers comparables à une date la moins éloigné de celle de notre étude) et l’unité du bien (obtention des loyers d’actifs comparables et analyse des composantes de leurs loyers faciaux).

Application :

  • Surface utile : 1500 m²
  • Surface pondérée : 1200 m²P
  • Valeur locative : 120 €/m²P

Valeur du loyer : 1200 m²P  x 120 €= 144 000 €

Avis sur cette méthode :

Cette méthode remporte les suffrages de la jurisprudence récente. Cette dernière admet une pondération de 1 sur l’ensemble des étages (hors sous-sol et éléments spécifiques) et l’utilisation de référentiels issus également d’immeubles de bureaux. Cette méthode, basée sur l’analyse d’un marché local déterminable plutôt que sur la rentabilité intrinsèque de l’établissement, est à la fois reconnue et simple d’application. L’utilisation de la pondération permet de moduler la valorisation des locaux en fonction de leur utilité.

1/ La méthode du chiffre d’affaires (ou quote-part de la recette globale) associée à un taux d’effort : cette méthode est basée sur un chiffre d’affaires, généralement bien identifiable. Il convient cependant de le retraiter en fonction de son origine immobilière/activité, ce qui peut laisser parfois une part d’arbitraire dans la répartition proposée par l’expert.

Application :

  • Chiffre d’affaires retenu pour sa seule part lié au bien immobilier (on retranche toutes les prestations de service annexes telles que le téléphone, l’utilisation de certains appareillages spécifiques tels que scanner, radiologie…) : 5 Millions d’Euros
  • Taux d’effort lié principalement à l’adaptation de l’établissement à l’activité exercée : entre 6 et 13% (ici nous retiendrons 8%). Ce taux d’effort prend en compte l’adéquation et le taux de remplissage des locaux, de même que la rentabilité de l’ensemble.

Valeur du loyer : 8% x 5 Millions €= 400 000 €

Avis sur cette méthode :

Cette méthode nous semble peu adaptée pour les difficultés de répartir le chiffre d’affaires selon son origine ainsi que la difficulté de justifier le taux d’effort retenu.

2/ La méthode de l’évaluation par les coûts ou méthode dite de rentabilité : c’est la méthode qui aurait pu être adoptée par les deux parties à l’origine du bail s’il n’avait pas été déterminé en fonction des impératifs de remboursement d’emprunt. Elle découle du fait que la valeur d’un bien est liée aux revenus qu’il procure.

Rappelons que dans les cliniques aujourd’hui, le même lit peut conduire à constater un rapport de 1 à 15 de la seule organisation du preneur. En effet, avec le même matériel, on obtient des résultats très différents. Cette valeur ajoutée du preneur ne doit pas en principe profiter au bailleur même si dans un local monovalent le bailleur ne peut ignorer l’activité du preneur.

Mais pour autant, cette méthode de rentabilité ne prend en compte que la rentabilité escomptée du bailleur propriétaire des murs et qui attend de son bien un certain rendement. Le loyer, tel qu’il est évalué par cette méthode, correspond au  rendement attendu de la part contributive qui revient au propriétaire.

Pour fixer la valeur locative, on procède à une évaluation de la valeur vénale des murs à partir du prix de reconstitution à neuf, duquel on déduit un certain nombre d’abattements permettant d’ajuster cette valeur à l’état du bien réel (taux de vétusté). On y ajoute le prix du terrain et on obtient la valeur de l’immeuble.

Reste à déterminer le taux de rendement auquel le propriétaire est en droit d’attendre.

La formule est la suivante : Valeur du loyer = (valeur du terrain + valeur des constructions du bâtiment expertisé)/Taux de rendement escompté

Comment apprécier ce taux de rendement?

Le taux de rentabilité sera estimé de préférence à partir des rentabilités historiques issues du marché locatif des cliniques (rendement attendu par les foncières de 6,5 % à 7,5%).

On peut également déterminer le taux de rentabilité à partir d’une approche financière combinant un taux “sans risque” à 10 ans (AAA zone EURO) avec une prime de risque liée au marché financier pondéré par un coefficient de risque du marché de l’immobilier médical (5%).

Il en résulterait le taux de rentabilité suivant : 2,5% + 70% x 5%= 7%.

La prime de risque d’un marché financier mesure l’écart de rentabilité attendue entre le marché dans sa totalité et l’actif sans risque (l’obligation d’Etat). Notons que par construction le taux de 100% serait retenu pour un investissement sur le CAC40, lui-même assez bien représentatif des fluctuations de l’économie générale. Les fluctuations de rentabilité de l’immobilier dans le domaine médical apparaissant atténuées, par rapport à l’économie générale, nous avons limité le coefficient à 70%.

Application :

  • Valeur du terrain: 1 000 m² x 50 €
  • Valeur de construction: 5 000 m² x 2 000 €
  • Valeur nette: 20% de vétusté (la lecture des comptes facilite l’application du taux de vétusté)
  • Taux de rendement: 7 % (usuel dans le domaine médical et notamment celui des cliniques et cohérent avec le calcul précédent)

Valeur du loyer: =((1 000*50)+(2 000*5 000)*0,80) / 7%= 1 150 000 €

Avis sur cette méthode :

Le succès de cette méthode est intimement lié au choix du taux de capitalisation qu’il convient de bien choisir. Sa mise en œuvre exige la connaissance du revenu de l’immeuble à évaluer et la recherche du taux de capitalisation adapté au type de l’immeuble. L’écart des taux entraine de grandes disparités de valeur d’où la nécessité de le justifier ou de reprendre la rentabilité spécifique au marché des cliniques Aussi une étude de marché s’impose à tout praticien de cette méthode.

Conclusion

Aujourd’hui la question centrale est moins sur le choix d’une méthode que d’une véritable démarche pragmatique tenant compte du type d’établissement, de sa configuration, de sa localisation géographique.

Le faible contentieux, depuis la T2A, est lié principalement aux priorités des gestionnaires des cliniques de centrer leur efforts sur la rationalisation de la gestion de leurs établissements.

Aujourd’hui ces efforts ont été faits, reste d’actualité le besoin de poursuivre les économies ; le loyer reste la seule variable d’ajustement.

Autant bien se préparer à justifier sa pertinence !

ISF

L’impôt sur la fortune et son incidence sur le patrimoine immobilier du contribuable, mérite d’être connu tant dans ses principes que dans ses modalités d’application alors que la grande majorité des contribuables, lorsqu’ils établissent leur déclaration, ne tiennent pas compte de toutes les possibilités qui leur sont offertes pour le calcul de l’impôt.

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